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Apologie de la cruauté amoureuse
L’Amour est partout, tout le temps, on en parle, on l’écrit, on le chante. Il devient un but en soi, l’accessoire indispensable à l’épanouissement de l’individu. On en gomme toutes les réalités éthologiques : l’Amour ne peut être le paquet-cadeau enrobant la volonté instinctive de reproduction de l’espèce, la parade nuptiale précédant la copulation.Trop vulgaire, trop trivial. L’Homme n’est pas un dindon, il veut du Beau, du Grand, du Poétique. L’Amour se doit d’être romantique et idéal.
L’endoctrinement commence tôt : les enfants sont gavés jusqu’à la nausée de princes charmants et de belles endormies, peuplant leurs esprits encore désexualisés d’espoirs d’éternité sereine entre des bras aimés. Les enfants vieillissent mais pas leurs rêves, alimentés de romans au parfum de bonbon. Ils gardent la Foi. Alors, parfois, leur solitude croise celle de l’Autre, l’apprivoise, l’épouse. Cela s’appelle un couple. Et avec un peu de chance, l’Autre sera celui qu’ils attendaient, tapis sous leurs couvertures, étourdis de caresses promises. Désormais, ils seront un.
D’autres s’abîment dans l’Amour, ils y meurent comme on se noie dans le vin : ils s’étourdissent dans la recherche d’un absolu inatteignable, une utopie amoureuse éternelle. Ils se repaissent de créatures sans cesse renouvelées, goûtant à l’infini la volupté de ne jamais connaître la lassitude d’un corps. De leur liberté transformée en cage, ils glissent inexorablement vers l’anéantissement d’eux-mêmes, étouffés par la crainte de la solitude dont ils se sont frénétiquement enivrés. Ceux-là sont perdus, livrés à un fantôme dont ils ne pourront qu’approcher l’ombre. Ce sont des emmurés à l’agonie.
D’autres enfin s’emplissent le cœur d’espoirs vains, soupirant de désir sans réponse. Plus braves ou plus fous, ils s’exposent, avancent sur la terra incognita du cœur de l’autre, avec pour seules armes leur orgueil ravalé et leurs mains moites. Déjà en défaite, ils offrent leur Amour en bégayant, ils s’offrent tout entiers en tremblant, misérable tribut d’une guerre que l’être convoité n’a pas dû mener. Ils s’affolent mais, dans un sursaut, sautent dans le vide, sans volonté de retour en arrière. Et rentrent bredouilles, la queue entre les jambes. On ne les aime pas.
Loin de s’éteindre, L’Amour contrarié prend des dimensions christiques sacrificielles; il devient Vrai, Absolu et Idéal, parce que jamais assouvi. Il autorise le fantasme passionnel ; il se construit dans la fébrilité de l’attente, il façonne un monde imaginaire magique et merveilleux où tout est permis. L’amoureux éconduit n’aura de cesse de convertir l’objet de ses sentiments à sa cause : il se fera missionnaire, il subira humiliations et quolibets sans ciller, Don Quichotte face à ses moulins, drapé dans son espoir monomaniaque. Il deviendra poète, musicien, danseur étoile pour exorciser sa souffrance. La cruauté infinie de l’indifférence sera leur muse.
L’Amour est partout, tout le temps, on en parle, on l’écrit, on le chante. Il devient un but en soi, l’accessoire indispensable à l’épanouissement de l’individu. On en gomme toutes les réalités éthologiques : l’Amour ne peut être le paquet-cadeau enrobant la volonté instinctive de reproduction de l’espèce, la parade nuptiale précédant la copulation.Trop vulgaire, trop trivial. L’Homme n’est pas un dindon, il veut du Beau, du Grand, du Poétique. L’Amour se doit d’être romantique et idéal.
L’endoctrinement commence tôt : les enfants sont gavés jusqu’à la nausée de princes charmants et de belles endormies, peuplant leurs esprits encore désexualisés d’espoirs d’éternité sereine entre des bras aimés. Les enfants vieillissent mais pas leurs rêves, alimentés de romans au parfum de bonbon. Ils gardent la Foi. Alors, parfois, leur solitude croise celle de l’Autre, l’apprivoise, l’épouse. Cela s’appelle un couple. Et avec un peu de chance, l’Autre sera celui qu’ils attendaient, tapis sous leurs couvertures, étourdis de caresses promises. Désormais, ils seront un.
D’autres s’abîment dans l’Amour, ils y meurent comme on se noie dans le vin : ils s’étourdissent dans la recherche d’un absolu inatteignable, une utopie amoureuse éternelle. Ils se repaissent de créatures sans cesse renouvelées, goûtant à l’infini la volupté de ne jamais connaître la lassitude d’un corps. De leur liberté transformée en cage, ils glissent inexorablement vers l’anéantissement d’eux-mêmes, étouffés par la crainte de la solitude dont ils se sont frénétiquement enivrés. Ceux-là sont perdus, livrés à un fantôme dont ils ne pourront qu’approcher l’ombre. Ce sont des emmurés à l’agonie.
D’autres enfin s’emplissent le cœur d’espoirs vains, soupirant de désir sans réponse. Plus braves ou plus fous, ils s’exposent, avancent sur la terra incognita du cœur de l’autre, avec pour seules armes leur orgueil ravalé et leurs mains moites. Déjà en défaite, ils offrent leur Amour en bégayant, ils s’offrent tout entiers en tremblant, misérable tribut d’une guerre que l’être convoité n’a pas dû mener. Ils s’affolent mais, dans un sursaut, sautent dans le vide, sans volonté de retour en arrière. Et rentrent bredouilles, la queue entre les jambes. On ne les aime pas.
Loin de s’éteindre, L’Amour contrarié prend des dimensions christiques sacrificielles; il devient Vrai, Absolu et Idéal, parce que jamais assouvi. Il autorise le fantasme passionnel ; il se construit dans la fébrilité de l’attente, il façonne un monde imaginaire magique et merveilleux où tout est permis. L’amoureux éconduit n’aura de cesse de convertir l’objet de ses sentiments à sa cause : il se fera missionnaire, il subira humiliations et quolibets sans ciller, Don Quichotte face à ses moulins, drapé dans son espoir monomaniaque. Il deviendra poète, musicien, danseur étoile pour exorciser sa souffrance. La cruauté infinie de l’indifférence sera leur muse.