L'armée israélienne ouvre le feu à Rafah, au moins 10 morts
Wed May 19, 2004 4:27 PM RAFAH, bande de Gaza (Reuters) - L'armée israélienne a ouvert le feu mercredi sur des milliers de Palestiniens qui manifestaient à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, faisant au moins 10 morts, et une cinquantaine de blessés, dont certains sont grièvement atteints, indique-t-on de source médicale palestinienne.
Les médias israéliens ont fait état pour leur part de 22 à 23 morts, dont plusieurs écoliers, mais, le directeur de l'hôpital du camp de Rafah, le Dr Ali Moussah, a contesté ce bilan, tout en estimant que le nombre de morts augmenterait sans doute, au vu de l'état de certains blessés.
Les tirs de missiles, provenant d'un hélicoptère, selon certains, d'un char, selon d'autres, ont semé la panique parmi la foule qui manifestait contre la destruction par des bulldozers de l'armée de centaines d'habitations dans le quartier de Tel Sultan, en lisière de la frontière égyptienne.
Selon un témoin, au moins trois missiles ont été tirés. Les corps de victimes ont été déchiquetés. Les manifestants se sont rués vers des abris, certains emmenant avec eux des blessés maculés de sang.
"L'armée israélienne enquête sur cet incident. Il s'est produit dans une zone de combat truffée d'engins explosifs déposés par avance par les Palestiniens. Il est encore trop tôt pour savoir ce qui s'est réellement passé à Rafah", a déclaré à Reuters un porte-parole de Tsahal, le capitaine Sharon Feingold.
Cet incident porte à au moins 33 - un bilan sans aucun précédent - le nombre de Palestiniens tués depuis le début, mardi, de ce qui apparaît comme l'opération la plus massive de l'armée israélienne à Gaza en 37 ans d'occupation de ce territoire.
Les hôpitaux du camp sont débordés par le nombre de blessés et les cadavres ont parfois été stockés dans des congélateurs de commerces voisins transformés en morgues improvisées pour les préserver de la chaleur.
Quelques heures plus tôt, l'armée, qui encercle le camp de réfugiés de Rafah, avait lancé par haut-parleurs des appels à la reddition de tous les activistes palestiniens, leur intimant l'ordre de sortir de leurs cachettes en agitant des drapeaux blancs.
CONDAMNATION INTERNATIONALE
Les soldats, qui poursuivent leur traque systématique des activistes maison par maison, ont ordonné le regroupement dans une école locale de tous les hommes âgés de plus de 16 ans, rapportent des témoins, bien que Tsahal dise ne rechercher que les activistes armés.
Certains habitants de Rafah ont fait état de voisins abattus sommairement par des soldats alors qu'ils émergeaient de leurs maisons conformément aux ordres des soldats. Selon l'armée, des hommes se rendent mais d'autres tirent aveuglément des toits des habitations.
La violence dans la bande de Gaza s'est intensifiée depuis le rejet ce mois-ci par le Likoud au pouvoir du plan du Premier ministre Ariel Sharon visant à évacuer unilatéralement le territoire palestinien capturé à l'Egypte en 1967.
La semaine dernière, Tsahal a perdu 13 hommes lors d'une incursion quasi-routinière qui a incité Sharon à lancer l'opération de vaste envergure en cours depuis mardi pour élargir le "couloir de sécurité" entre la frontière égyptienne et le camp de Rafah.
Cette opération, qui implique la démolition de centaines d'habitations, a été condamnée par la communauté internationale, de l'Union européenne à la Ligue arabe en passant par les Nations unies.
Le président George Bush, qui s'est aligné récemment sur la politique de Sharon, s'était dit mardi "troublé" par la recrudescence de la violence, mais, après les incidents de mercredi, la Maison blanche a déclaré être "très préoccupée" et avoir demandé un compte rendu des faits à Israël.